Si vous craignez l'enfer confessez vous sans crainte

Publié le par WalkTsin

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Quelle vie malheureuse mènent ceux qui cachent leurs péchés en se confessant, et qui restent avec de tels bourreaux dans leur cœur !

 

Vous avez toujours la pensée que vous les accuserez dans une confession ou avant de mourir. Mon ami, vous êtes un aveugle, vous ne le ferez pas ; le démon vous en empêchera aussi bien dans vos autres confessions ou à l'heure de votre mort, qu'il vous en a empêché jusqu'à présent. Si vous en doutez, écoutez-moi et vous verrez que cela est vrai ; que celui qui vit dans le sacrilège est à peu prés sûr d'y mourir. Il est rapporté par le Père Jean Romain, de la Compagnie de Jésus, que le fameux Jean d'Avila, prêchant dans une ville d'Espagne, fut appelé pour entendre la confession d'une demoiselle qui, par les soins de sa mère, avait été élevée dans toutes sortes de vertus. Cette mère ne manquait pas de communier tous les samedis en l'honneur de la sainte Vierge.

 

La mère étant morte, la fille continua dans la même dévotion, ajoutant, de plus, plusieurs aumônes, des jeûnes et autres bonnes œuvres. Comme elle entendait souvent prêcher le Père Jean d'Avila, elle en était vraiment touchée, elle se sentait vivement portée à la vertu. Étant tombée malade, elle le fit prier de venir la voir, parce qu'elle désirait bien se confesser à lui. Quoique son mal ne fût pas fort dangereux, elle voulait pourvoir de bonne heure au salut de son âme.

 

Elle le priait d'avoir la charité de l'entendre, parce qu'il y avait longtemps qu'elle désirait se confesser et bien lui découvrir l'état de son âme. Le Père lui accorda avec joie ce qu'elle demandait. Elle commença à se confesser avec des marques d'une douleur si vive et avec une si grande abondance de larmes, que le Père était dans l'admiration de trouver une si belle âme, du moins en apparence.

 

Sa confession étant finie, le Père s'en va tout consolé ; lui ayant donné l'absolution, il la laissait dans une grande sûreté pour son salut, toujours du moins en apparence. Il arriva cependant une chose fort extraordinaire. Le Frère, que ce Père avait mené pour l'accompagner, étant dans une autre chambre, voyait venir de temps en temps, du côté de la muraille, une main noire toute couverte de poils, qui serrait la gorge de la malade de manière qu'il semblait qu'elle voulût l'étouffer. Le Frère, voyant cela, fut fort étonné.

 

Étant retourné au couvent, il va trouver le supérieur à qui il raconte ce qu'il avait vu. Le supérieur lui demanda s'il était bien sûr de cela. Il lui dit : « J'en suis aussi sûr que je suis sûr d'être devant vous. Pendant quelques instants j'en ai douté, mais, ayant encore redoublé d'attention, j'ai vu tout ce que je vous dis. » Alors le supérieur appelle le Père Jean, et, quoique ce fût la nuit, il lui commande de retourner chez la malade, en lui disant de faire tout ce qu'il pourrait pour l'engager à se réconcilier si elle se sentait quelque chose qui lui fit de la peine. Le Père part avec le même compagnon.

 

Lorsqu'ils furent à la porte, ils entendirent des cris et des gémissements ; mais à peine eurent-ils frappés, qu'un valet vint leur dire que sa maîtresse était morte, que presque aussitôt après sa confession, elle avait perdu la parole et l'usage de ses sens, de sorte qu'elle n'avait pas pu communier. Après avoir vu la défunte, ils retournèrent au couvent où ils rendirent compte au supérieur de ce qui était arrivé, ce qui l'affligea beaucoup. Le Père qui avait confessé la malade fut saisi d'une si grande douleur qu'il se mit à pleurer amèrement, et s'en alla devant le Saint--Sacrement, où, étant prosterné, il commença à prier le Seigneur pour le repos de cette malheureuse fille, lui demandant de vouloir la retirer de la damnation éternelle. Après avoir prié quelques moments, il entendit un grand bruit comme de grosses chaînes qu'on traînait par terre.

 

S'étant tourné du côté de ce bruit, il vit devant lui une personne environnée, depuis les pieds jusqu'à la tête, de chaînes et de flammes obscures. Le Père, sans s'effrayer, lui demanda qui elle était.

 

Elle lui répondit : « Je suis l'âme de cette malheureuse fille que vous êtes venu confesser ce matin, je suis celle pour qui vous priez, mais en vain. J'ai trompé le monde par mes hypocrisies et mes fausses vertus. Il faut que vous connaissiez ces hypocrisies. Après la mort de ma mère, un jeune homme était épris d'amour pour moi ; je fis d'abord quelques résistances ; mais il vint à bout de ma faiblesse. Si ma faute fut grande, la répugnance que le démon fit naître en moi pour la confesser alla encore plus loin ; je sentais de vifs remords de conscience, la crainte des tourments où je me trouve maintenant m'était un supplice. Inconsolable et ne cherchant qu'à sortir de cette peine, j'avais résolu plusieurs fois de m'en confesser ; mais la honte et l'appréhension que mon confesseur perdit la bonne opinion qu'il avait de moi, m'en avait toujours empêchée.. Dans cette crainte, je voulus toujours continuer mes confessions et mes communions. Lorsque j'entendais vos sermons, c'était autant de dards qui me perçaient le cœur, et, je pris enfin la résolution de me confesser à vous : c'est pour cela que je vous fis appeler. Ah ! j'aurais bien dû commencer par mes sacrilèges, et non par les petites fautes ! car, ensuite, je n'eus jamais la force de vous accuser mon péché caché. Me voilà damnée pour jamais ! Ne perdez pas votre temps à prier pour moi. »

 

– « Mais, quelle est la plus grande de vos peines ? » lui demanda le Père.

 

« C'est de voir, lui répondit-elle, que j'aurais pu me sauver en avouant mon péché, aussi facilement que je viens de vous le dire, sans que j'en tire aucun fruit. » Après cela elle disparut, poussant des cris épouvantables et faisant un bruit effroyable avec ses chaînes.

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